Ceci est une ancienne révision du document !
Ce que Adam Smith nommait « cette opulence générale qui se répand jusque dans les dernières classes du peuple » (dans son célèbre ouvrage de 1776, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations) reste, encore aujourd'hui, au cœur des préoccupations. La croissance économique, à l'origine de cette opulence, est ainsi un sujet central d'étude pour les économistes.
On retient le plus souvent la définition de François Perroux (économiste français, 1903-1987) de la croissance économique :
C’est donc un phénomène de long terme, c’est-à-dire durable. Par son caractère durable, la croissance se distingue de l’expansion (accroissement momentané et réversible de la production qui concerne donc le court terme, c'est-à-dire une phase temporaire de la conjoncture).
C’est un phénomène quantitatif. L’indicateur généralement retenu pour le mesurer est le PIB (Produit intérieur brut), principal agrégat de la comptabilité nationale. La croissance est alors assimilée au taux de croissance du PIB. Il peut s'agir, parfois, du RNB (Revenu national brut).
Pour comprendre les documents suivants, il faut savoir faire la différence entre prix courants et prix constants.
Source : Comptes nationaux - Base 2010, Insee. Disponible en ligne : http://www.insee.fr/fr/themes/comptes-nationaux/tableau.asp?sous_theme=1&xml=t_1105
Source : Insee, Comptes nationaux - Base 2010. Disponible en ligne : http://www.insee.fr/fr/themes/comptes-nationaux/tableau.asp?sous_theme=1&xml=t_1102 (version ods)
Source : Insee, Comptes nationaux - Base 2010. Disponible en ligne : http://www.insee.fr/fr/ffc/figure/NATTEF08112.xls (version ods)
Note : PIB par habitant en dollars internationaux Geary-Khamis de 1990.
Remarque : on utilise le produit par tête pour donner une mesure de la croissance qui annule l’effet de population (2 pays peuvent avoir le même PIB, mais l’un est beaucoup plus peuplé que l’autre).
Source : The Maddison-Project, http://www.ggdc.net/maddison/maddison-project/home.htm, version 2013.
Note : PIB par habitant en dollars internationaux Geary-Khamis de 1990.
Source : The Maddison-Project, http://www.ggdc.net/maddison/maddison-project/home.htm, version 2013.
Source : Données sur les comptes nationaux de la Banque mondiale et fichiers de données sur les comptes nationaux de l'OCDE. Disponible en ligne : http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/NY.GDP.MKTP.CD/countries/1W?display=default
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Source : John Maynard Keynes, The Listener, extrait d'une émission
radiodiffusée du 14 janvier 1931. Traduction française in John Maynard Keynes, Essais sur
la monnaie et l'économie, Payot, 1971.
Du côté offre, la croissance économique peut être le résultat de l’accroissement quantitatif des facteurs de production ou d’une nouvelle combinaison plus efficace des facteurs de production, les facteurs de production agissant alors par le biais de la productivité qu’ils engendrent.
Le raisonnement économique s'appuie souvent sur la fonction de production pour analyser le rôle des facteurs de production dans la croissance économique.
Vous avez étudié, les années précédentes, les facteurs de production – travail et capital – qui sont utilisés au cours du processus de production.
Pour produire un bien ou un service, il est nécessaire de disposer de ce que les économistes appellent des facteurs de production, c'est-à-dire d'éléments matériels ou immatériels qui rendent possible la réalisation d'un produit.
On en distingue deux : le facteur travail et le facteur capital (capital fixe ; capital circulant ou consommations intermédiaires).
Pour une même production, il est parfois possible procéder de plusieurs façons. On dit alors que l'entreprise peut combiner de façon différente le capital et le travail.
Exemple fictif : Pour pétrir une fournée de pain, une boulangerie peut embaucher 3 travailleurs et un peu de matériel ou un travailleur et une machine à pain.
Le choix entre l'une et l'autre des combinaisons productives possibles dépendra de l'abondance des facteurs de production (capital ou travail), mais surtout du coût relatif du travail par rapport au capital et l’efficacité productive de la combinaison retenue (mesurée par la productivité).
Exemple : Si le coût du travail est cher, une entreprise préférera privilégier le capital. On dira que l'intensité capitalistique de la production (celle-ci est mesurée par le coefficient de capital = capital utilisé/production réalisée) est plus forte. Dans le cas inverse, on dira que l'intensité capitalistique de la production est plus faible.
Les facteurs capital et travail sont le plus souvent complémentaires, c'est-à-dire que l'un n'a pas d'utilité sans l'autre. Pour modifier la quantité produite, ils doivent donc varier proportionnellement. On dit alors que la combinaison productive est rigide.
Exemple : une entreprise ne peut pas acheter un nouveau camion sans embaucher un nouveau chauffeur.
Les facteurs de production peuvent parfois être substituables, c'est-à-dire se remplacer l'un l'autre (on peut utiliser du capital plutôt que du travail ou inversement). On dit alors que la combinaison productive est flexible.
En économie, dans un cadre concurrentiel, la fonction de production permet comprendre la relation mécanique qui existe entre quantité de facteurs et quantité produite : si la quantité de facteurs augmente, alors la quantité produite augmente aussi (et inversement).
La fonction de production établit une relation mathématique entre la quantité produite et la quantité de facteurs de production nécessaire pour l'obtenir.
La fonction de production peut être présentée de la façon suivante :
Y = f(L,K).
— avec Y = quantité produite,
— L = quantité de travail nécessaire à la production,
— K = quantité capital nécessaire à la production.
La fonction de production permet de mesurer l'impact d'une modification de la combinaison productive sur le niveau de la production : lorsque la quantité de travail (L) et/ou la quantité de capital (K) sont modifiées, la quantité produite (Y) varie (à la hausse ou à la baisse, selon les cas).
Dans les faits, on constate qu'il y a bien une relation entre facteurs de production et croissance. Si celle-ci peut subir l'influence d'éléments extérieurs, on voit qu'elle dépend de la nature de la combinaison productive dominante dans le pays considéré.
1. La productivité multifactorielle correspond ici à la notion de productivité globale des facteurs (PGF).
Source : Données extraites le 08 Sep 2015, 10:47 UTC (GMT), de OECD.Stat. Disponible en ligne : http://stats.oecd.org/Index.aspx?DatasetCode=GDP&lang=fr#
Rappel de lecture : l'addition des différentes contributions – en points de pourcentage – permet d'obtenir le PIB – en pourcentage. Autrement dit, le PIB est décomposé en différentes contributions.
1. PIB juin 2014, changement méthodologique et base 2010.
2. Administrations publiques et privées (État, enseignement supérieur et institutions sans but lucratif).
3. Résultat 2009 recalculé de façon à être comparable à 2010.
4. Changement méthodologique.
5. Résultats définitifs.
6. Résultats semi-définitifs.
7. Estimations.
Champ :France entière.
Source : MENESR-DGESIP/DGRI-SIES. Disponible en ligne : http://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/8/EESR8_R_26-l_effort_de_recherche_et_developpement_en_france.php
Source : Robert Boyer, « La « nouvelle économie » au futur antérieur : histoire, théories, géographie », n°2001- 13, Cahiers du Cepremap, août 2001, p. 52. Disponible en ligne : http://www.cepremap.fr/depot/couv_orange/co0113.pdf
Source : John Maynard Keynes, Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, chap. 12, 1936. Disponible en ligne.
Dans la théorie économique, il est devenu usuel (même si cela reste très discuté) de distinguer croissance économique « potentielle » et croissance économique « réelle » (ou « effective »).
La croissance économique étant mesurée par le PIB, le PIB réel/effectif est celui qui est constaté et le PIB potentiel est une estimation statistique de la croissance potentielle. L'écart de production (ou « outputgap ») est alors la différence entre le PIB réel et le PIB potentiel.
Dans un monde « idéal » (au sens de « idéal-typique »), c'est-à-dire un monde où aucune perturbation ne viendrait entraver le fonctionnement de l'économie, où les capacités de production (capital et travail) seraient pleinement utilisées sans susciter d'inflation, la croissance potentielle serait réalisée. Cette croissance serait durable et stable. Elle représente donc la « tendance » (le « trend » en anglais) que devrait suivre la conjoncture.
Dans la réalité, la croissance économique, dite réelle ou effective, est un phénomène instable, soumis à « des hauts et des bas » plus ou moins brusques et plus ou moins durables. Ces hauts et ces bas, ce sont les fluctuations économiques.
(Programme TES 2011, Notions)
Les fluctuations économiques sont constituées de l’ensemble des mouvements affectant l'activité économique, qu'il s'agisse de phases d’expansion (accélération de la croissance économique) ou de récession/dépression (ralentissement/baisse de la croissance économique).
Ces fluctuations affectent, bien sûr, le PIB mais concernent, plus généralement, les principales variables de l'activité économique (chômage, inflation…).
Ces mouvements peuvent être plus ou moins réguliers, auquel cas on parlera souvent de cycles économiques qui désignent la répétition au cours du temps de phases d’expansion économique, puis de récession/dépression.
Remarque : ces deux termes sont proches et souvent utilisés comme synonymes.
Si on découpe le cycle en 4 phases, on a donc la succession : expansion – crise – récession/dépression – reprise…
Trois types de cycles peuvent être distingués :
— Cycles de Kondratiev (ou Kondratieff) (cycles longs), environ 40 à 60 ans. Il est associé par Schumpeter à l'évolution du progrès technique (apparition des innovations). Il distingue la « phase A » du cycle Kondratiev, qui correspond à la phase ascendante, et la « phase B », qui correspond à la phase descendante.
— Cycles de Juglar (ou cycle des affaires ou intermédiaire ou moyens), environ 7 à 11 ans.
— Cycles de Kitchin (ou cycle mineur ou court), environ 3 à 4 ans (2 Kitchin = 1 juglar environ).
Courbe 1 = cycles longs ; courbe 2 = cycles intermédiaires ; courbe 3 = cycles courts ; courbe 4 = somme des courbes 1-3.
Source : Joseph Aloïs Schumpeter, Business cycles, 1939. Disponible en ligne (en) : http://dx.doi.org/doi:10.1522/030021081
Source : Martin Vidberg, « Une enquête du docteur maison », Blog L'actu en patates, 18 septembre 2008. Note disponible en ligne : http://vidberg.blog.lemonde.fr/2008/09/18/une-enquete-du-docteur-maison/
Lorsque l'on compare croissance effective et croissance potentielle, deux situations se présentent :
Source : Insee, Comptes nationaux - Base 2010. Disponible en ligne : http://www.insee.fr/fr/ffc/figure/NATTEF08112.xls (version ods)
Source : OCDE. (version ods)
Comme vous l'avez vu en Première, le PIB est un agrégat de la comptabilité nationale dont la construction, comme celle de tous les indicateurs statistiques, est loin d'être parfaite. Par conséquent, la mesure de la croissance économique qui en résulte n'est qu'un reflet partiel –– et en partie biaisé –– de la réalité économique.
Pour commencer, le PIB ne permet qu'une mesure incomplète de la production dans la mesure où une partie de celle-ci échappe à la comptabilité nationale. C'est vrai notamment pour :
Ensuite, la mesure en valeur du PIB ne permet pas de distinguer l'évolution liée à l'inflation de celle liée à une hausse réelle de la richesse. Les données ainsi obtenues ne sont donc pas réellement comparables dans le temps : l’inflation est trompeuse (Keynes parle d'une « illusion monétaire »), car l'augmentation des prix fait mécaniquement augmenter le PIB en valeur alors qu'il n'y a pas nécessairement de hausse de la valeur ajoutée. Il faut ainsi raisonner sur l'évolution en volume, c'est-à-dire en termes de monnaie constante, et donc « déflater » la monnaie pour retirer l’inflation. Autrement dit, il faut calculer le PIB réel.
(Programme 2nde 2010, Notions (effets externes) ; Programme 1ES 2010, Notions ; Programme TES 2011, Acquis de première)
Les externalités ou effets externes sont les conséquences d’une action individuelle sur un autre acteur, qui ne sont pas prises en compte par le marché ou le système de prix. Il est usuel de dire qu'elles sont le « résultat non voulu d'une action voulue ».
Elles peuvent être positives (exemples : l'implantation de ruches à proximité d'un verger, la vaccination, la recherche) ou négatives (exemples : la pollution, la dégradation de ressources naturelles, le bruit).
Leur existence est donc à l'origine d'une défaillance du marché et justifie l’intervention publique, permettant d’ « internaliser » les externalités (c’est-à-dire faire en sorte qu’elles soient prises en compte par les agents économiques dans leurs calculs coût/avantage).
Exemples : instauration par l'État d’une taxe sur les produits polluants (souvent nommée taxe « Pigou »), subventions à la recherche, vaccination gratuite et obligatoire, etc.
Il ne tient notamment pas compte du bien-être et du développement.
Aussi existe-t-il d'autres indicateurs : c'est le cas, par exemple, de l'IDH, indicateur du développement.
Pour commencer, qu'est-ce que le développement ?
François Perroux définit le développement ainsi :
« Le développement est la combinaison des changements mentaux et sociaux d'une population qui la rendent apte à faire croître, cumulativement et durablement, son produit réel global ».
Source : François Perroux, L'économie du XXe siècle, PUF, 1961.
Le développement est donc l'ensemble des transformations des structures démographiques, sociales, culturelles et politiques qui rendent possible une croissance économique stable. Autrement dit, pour François Perroux, le développement est fortement lié à la croissance, mais il s'en distingue nettement.
Le développement est ainsi :
Les étapes du développement :
Walt Whitman Rostow (Les étapes de la croissance économique, 1960) explique que tous les pays passent par cinq étapes pour arriver au développement :
Fondée sur l'évolution du taux d'investissement, son étude tend à montrer que les pays en développement sont simplement en retard sur les autres (il n'ont pas encore franchi l'étape du décollage). Autrement dit, il n'y aurait pas véritablement de cause structurelle au sous-développement qui puisse handicaper durablement les pays. De ce fait, accéder au développement revient, pour un pays, à un phénomène de rattrapage, plus ou moins long, mais inéluctable. Pour accélérer ce processus, il suffit d'ailleurs, pour Rostow, de favoriser le libre-échange et le développement de l'esprit d'entreprise.
Pour mesurer le niveau de développement, on utilise un indicateur économique différent du PIB, l’IDH (indicateur de développement humain). Il s'agit d'un indicateur plus qualitatif que le PIB dans la mesure où il n'intègre pas seulement des données économiques.
(Programme TES 2011, Notions)
L'IDH, Indice de développement humain, est l'indicateur du développement économique.
Source : PNUD, Rapport sur le développement humain, Notes techniques, 2010, p. 239. Disponible en ligne
Pour chacun des indicateurs, on calcule, un indice dimensionnel :
Indice dimensionnel = (valeur utilisée – valeur minimale)/(valeur maximale – valeur minimale).
Remarque : pour l'éducation, on calcule la moyenne géométrique des deux indices.
L'IDH s'obtient, ensuite, en calculant la moyenne géométrique des trois dimensions :
IDH = ( Ilongévité1/3 . Iinstruction1/3 . Irevenu1/3 )
L'IDH prend donc en compte non seulement le niveau de vie, mais également la santé de la population et le niveau d'éducation.
Plus l'IDH se rapproche de 1, plus le niveau de développement du pays est élevé. Inversement, plus il est faible, plus le niveau de développement du pays est faible.
On classe chaque année les pays en quatre grandes catégories, selon que leur développement est : faible (< 0,55), moyen (0,55 =< IDH < 0,7), élevé (0,7 =< IDH < 0,8) ou très élevé (IDH > ou égal à 0,8).
Remarque : il admet lui aussi des limites dans la mesure où, par exemple, il ne prend pas en compte le niveau d’inégalités dans le pays (c'est pourquoi a été notamment crée l'IDHI, Indice de développement humain ajusté aux inégalités).
Source : PNUD, Rapport sur le développement humain, Notes techniques, 2010, p. 241. Disponible en ligne
Source : PNUD. Disponible en ligne : Fichier Excel
Le Rapport Bruntland définit le développement durable (ou soutenable) ainsi :
« Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. »
Source : Gro Harlem Brundtland, « Vers un développement durable », Notre Avenir à Tous, Rapport de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’ONU dit Rapport Brundtland, chapitre 2, Avril 1987.
Ce ne sont donc pas seulement les besoins des générations actuelles mais aussi futures qui vont déterminer le choix de société.
Pour permettre un développement durable, certaines conditions doivent être remplies :
Source : Gro Harlem Brundtland 3), « Vers un développement durable », Notre Avenir à Tous, Rapport de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’ONU dit Rapport Brundtland, chapitre 2, Avril 1987.
Question :
1. À quelles conditions la croissance est-elle soutenable ? (EC1, France métropolitaine, 2015, rattrapage)
Le développement durable renvoie à l'idée de soutenabilité de la croissance. Une croissance est soutenable si elle respecte trois conditions :
Autrement dit, la soutenabilité ne se réduit pas à la prise en compte des conséquences négatives de la croissance sur l'environnement mais s'étend à la question sociale. Il implique une double solidarité : intragénérationnelle (à l’égard des plus démunis au sein d'une même génération) et intergénérationnelle (entre générations).
Il importe de remarquer ici que le développement durable n’exclut pas la croissance.
Le Rapport Brundtland affirme ainsi que : « le développement et la croissance sont compatibles, à condition que les contenus de celle-ci respectent les principes que sont la durabilité et la non exploitation d’autrui ».
Nous avons vu, lorsque nous avons étudié le phénomène de la croissance, que l'on ne saurait s'arrêter à son aspect quantitatif uniquement. En effet, au delà de l'augmentation de la richesse économique se pose la question du développement des sociétés qui passe, entre autre, par l'amélioration du niveau de vie des populations et de leur bien-être (donc l'aspect qualitatif). Cette vision du développement économique peut être étendue à la question d'un développement durable, donc respectueux non seulement de l'environnement et des ressources naturelles mais intégrant également des préoccupations sociales, le tout sur le long terme.
Dans cette perspective, un premier bilan de la situation actuelle peut être fait.
Alors, quel bilan peut-on tirer ?
Pour permettre de mesurer les conséquences de l'activité humaine, un indicateur utile est celui de l'empreinte écologique :
Source : WWF, Rapport Planète Vivante 2008, octobre 2008, p.42. Disponible en ligne : http://assets.panda.org/downloads/lpr_wwf_2008_french.pdf
En vérité, l'empreinte écologique est un indicateur double : d'un coté, on mesure l'empreinte en elle-même, c'est-à-dire les besoins d'un individu exprimés en hectares ; de l'autre côté, on mesure la biocapacité, c'est-à-dire les ressources disponibles pour répondre à ces besoins, elles aussi exprimées en hectares. Le chiffre qui est exploité est alors la différence entre cette empreinte (les besoins) et la biocapicité (les ressources disponibles). Si les besoins sont supérieurs aux ressources, il y a un déficit ; dans le cas inverse, il y a une réserve.
Source : Global Footprint Network, National Footprint Accounts, Édition 2015. Version interactive disponible en ligne : http://www.footprintnetwork.org/ecological_footprint_nations/
De façon générale, il est aisé de constater les disparités mondiales en matière d'atteintes à l'environnement :
Source : Global Footprint Network, National Footprint Accounts, Édition 2008. Disponible en ligne : http://www.footprintnetwork.org/download.php?id=509
En terme d'évolution :
Source : Global Footprint Network. Disponible en ligne : http://www.footprintnetwork.org/fr/index.php/GFN/page/trends/france/
Note : per capita signifie « par tête »/« par habitant ».
Ainsi, de façon plus générale, lorsqu'il est question de développement durable, le constat redonne une relative validité aux thèses malthusiennes.
De fait, la croissance de la population mondiale a rendu plus visibles les effets négatifs de la croissance sur le niveau des ressources naturelles.
Voir Document 1. Dossier documentaire développement durable.
Pour établir un bilan correct de la question environnementale, il importe également de distinguer ressources renouvelables et non renouvelables :
On comprend, dès lors, que l'un des principaux problèmes posé par le mode de croissance actuel est l'épuisement des ressources non renouvelables. Par exemple, les ressources d'énergie fossiles (pétrole et gaz notamment) posent aujourd'hui un problème crucial quant à leur échéance prochaine : les réserves de pétrole sont en effet estimées à environ 1/2 siècle (45 ans) au rythme de consommation actuelle, celles de gaz à 65 ans et celles de charbon à un peu plus de 200 ans. Cet exemple peut être, en particulier, étendu à l'ensemble des matières premières nécessaires à la production humaine.
Les ressources naturelles renouvelables ne sont par pour autant exemptes de risques. On constate notamment l'aggravation des menaces pesant sur la biodiversité. Celle-ci peut se définir à la fois en terme de variété et d'importance des espèces et des écosystèmes. Ainsi, on assiste à une réduction de la biodiversité concernant les ressources halieutiques, cynégétiques et végétales.
Voir Document 6 & 7. Dossier documentaire développement durable.
À ce problème de l'épuisement des ressources naturelles s'ajoute celui de la dégradation de l'environnement (qui n'est d'ailleurs pas sans lien). En effet, en produisant, les agents économiques sont à l'origine d'externalités négatives et, en particulier, d'émissions polluantes et de rejets de déchets en quantité de plus en plus importante.
Rappel :
(Programme 2nde 2010, Notions (effets externes) ; Programme 1ES 2010, Notions ; Programme TES 2011, Acquis de première)
Les externalités ou effets externes sont les conséquences d’une action individuelle sur un autre acteur, qui ne sont pas prises en compte par le marché ou le système de prix. Il est usuel de dire qu'elles sont le « résultat non voulu d'une action voulue ».
Elles peuvent être positives (exemples : l'implantation de ruches à proximité d'un verger, la vaccination, la recherche) ou négatives (exemples : la pollution, la dégradation de ressources naturelles, le bruit).
Leur existence est donc à l'origine d'une défaillance du marché et justifie l’intervention publique, permettant d’ « internaliser » les externalités (c’est-à-dire faire en sorte qu’elles soient prises en compte par les agents économiques dans leurs calculs coût/avantage).
Exemples : instauration par l'État d’une taxe sur les produits polluants (souvent nommée taxe « Pigou »), subventions à la recherche, vaccination gratuite et obligatoire, etc.
Or, ces effets négatifs sont d'autant plus problématiques à résoudre qu'ils sont difficilement mesurables, que l'attribution des responsabilités quant à leur origine est souvent impossible et qu'il est difficile d'en traiter les conséquences.
Voir Document 3 & 4. Dossier documentaire développement durable.
Au final, force est de constater que la situation environnementale est devenue préoccupante.
Pour analyser la question du développement durable, les économistes s'appuient sur la prise en compte des quatre types de capitaux suivants :
(Programme 2nde 2010, Notions ; Programme TES 2011, Notions)
La notion de capital humain a été rendue célèbre par Gary Stanley Becker (microéconomiste, Prix Nobel d'économie 1992, 1930-2014).
Gary S. Becker définit le capital humain de la façon suivante :
« […] Schooling, a computer training course, expenditures on medical care, and lectures on the virtues of punctuality and honesty are capital too in the sense that they improve health, raise earnings, or add to a person’s appreciation of literature over much of his lifetime. Consequently, it is fully in keeping with the capital concept as traditionally defined to say that expenditures on education, training, medical care, etc., are investments in capital. However, these produce human, not physical or financial, capital because you cannot separate a person from his knowledge, skills, health, or values the way it is possible to move financial and physical assets while the owner stay put. […] »
Source : Gary S. Becker, Human Capital: A Theoretical and Empirical Analysis, with Special Reference to Education, University of Chicago Press, 3ème édition, 1993 (édition originale : 1964), pp. 15-16.
Le capital humain désigne ainsi l’ensemble des connaissances, des qualifications et des aptitudes acquises par les individus (il est donc un résultat de la production).
Il détermine leur capacité à participer efficacement à l'activité productive (il est donc un facteur de production) et à en tirer un revenu.
Il peut être accumulé (augmenter) grâce à des investissements, c'est-à-dire au travers de l’éducation et l’apprentissage (formation initiale), puis par la formation continue et l’expérience professionnelle.
Enfin, il est sensible au phénomène d'obsolescence lorsqu'il n'est pas entretenu (voir l'idée d'employabilité).
Le capital institutionnel correspond à l'ensemble formé par les institutions.
Voir institution.
Les institutions sont définies par Douglass Cecil North (1920-2015), économiste et historien américain :
« Institutions are the humanly devised constraints that structure human interaction. They are made up of formal constraints (rules, laws, constitutions), informal constraints (norms of behavior, conventions, and self imposed codes of conduct), and their enforcement characteristics. Together they define the incentive structure of societies and specifically economies. »
Source : Douglass C. North, Prize Lecture: Economic Performance through Time, publié dans Economic Performance Through Time, The American economic review, vol. 84, n°3, 1994, p. 360.
Il s'agit de sa Conférence pour le Prix de la Banque de Suède en l'honneur d'Alfred Nobel4) en 1993. Disponible en ligne : http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/economic-sciences/laureates/1993/north-lecture.html
Les institutions sont les contraintes établies par les individus, contraintes qui structurent les interactions humaines. Elles se composent :
(Programme TES 2011, Notions)
Le capital naturel est l'ensemble des ressources naturelles utilisables pour produire.
Exemples : ressources minérales, cynégétiques (faune sauvage), halieutiques (aquatiques), végétales…
Le capital naturel doit donc être considéré comme un stock. Ce stock est limité. Dans une perspective de développement durable, il importe donc de le préserver.
Il n'est pas nécessairement produit, mais les ressources qu'il fournit sont exploitables par l'homme. Ainsi, les forêts gérées par l'Office National des Forêts (ONF, organisme français), par exemple, sont le résultat d'une production. Par contre, les forêts primaires ne sont pas le résultat d'une production, mais elles peuvent être exploitées pour produire. De même, les poissons issus de la pisciculture (élevage des poissons) sont produits, à l'inverse des poissons « sauvages ».
Remarque : ce n'est pas parce qu'il est exploitable, qu'il est forcément exploité.
(Programme TES 2011, Notions)
Le capital physique est l'ensemble des biens produits utilisés comme facteurs de production. Il sert donc à produire et est lui-même un résultat de la production.
Exemples : bâtiments, machines…
Remarque : le capital physique semble se distinguer du capital technique et du capital fixe, tel que les définit la comptabilité nationale, en ce que ces derniers incluent des éléments immatériels et pas seulement matériels. Le capital physique serait alors matériel… sauf que certains auteurs adoptent une acception large du capital physique qui inclut, elle aussi, des éléments immatériels. Bref, il existe un flou sur cette question…
Ces quatre capitaux permettent de décrire l'ensemble des ressources à considérer dans le cadre d'une économie productive.
À ces quatre capitaux est, parfois, ajouté le capital social, dans la mesure où, dans un monde de plus en plus interconnecté, le capital correspondant aux ressources relationnelles n'est pas sans impact sur la sphère économique. C'est le cas, par exemple, du document 1 (issu de la Banque mondiale, Dossier documentaire sur le développement durable) qui regroupe le capital humain, le capital social et le capital institutionnel au sein du capital immatériel.
Celui-ci se caractérise de la façon suivante :
(Programme 1ES 2010, Notions ; Programme TES 2011, Acquis de première)
Le capital social est un ensemble de ressources relationnelles dont il est possible de tirer profit.
Il est défini par Pierre Bourdieu comme suit :
« Le capital social est l’ensemble des ressources mobilisées (des capitaux financiers, mais aussi de l’information, etc.) à travers un réseau de relations plus ou moins étendu et plus ou moins mobilisable qui procure un avantage compétitif en assurant aux investissements des rendements plus élevés. »
Pierre Bourdieu, Les structures sociales de l’économie, Liber, Seuil, Paris, 2000, p. 237.
Il ajoute que cette définition du capital social :
« prend en compte non seulement le réseau des relations, caractérisé dans son étendue et sa viabilité, mais aussi le volume du capital de différentes espèces qu’il permet de mobiliser par procuration (et, du même coup, les profits divers qu’il peut procurer : promotions professionnelles, participation à des projets, accès à des décisions importantes, occasions d’investissements financiers ou autres). »
Pierre Bourdieu, Les structures sociales de l’économie, Liber, Seuil, Paris, 2000, p. 237n.
Comme toute forme de capital, ces différents types de capitaux peut faire l'objet d'une accumulation (augmentation du stock de capital) ou d'une destruction (diminution du stock de capital). La dotation en capital n'est donc pas figée.
De même, la dotation en capital des différents types varient d'un pays à l'autre en fonction du territoire, du niveau de développement, des investissements réalisés, des politiques publiques, etc. On retrouve à cet égard la question des inégalités de développement économique puisque les pays les plus développés sont le plus souvent ceux qui sont les mieux dotés dans les différents capitaux et/ou, lorsqu'ils ne le sont pas, sont en mesure d'obtenir les ressources en capitaux qui leurs font défaut (on peut repenser ici à l'exemple des sociétés pétrolières ou minières dont la localisation se situe majoritairement dans les pays développés alors que leur activité d'exploitation est essentiellement située dans des pays en développement).
Voir Document 2. Dossier documentaire développement durable.
L'analyse théorique de la soutenabilité tente de dégager les mécanismes qui permettraient de garantir un développement durable. Deux courants théoriques principaux s'opposent de ce points de vue : les tenants de la soutenabilité dite « faible » et ceux de la soutenabilité dite « forte ».
Cette approche est celle que l'on trouve chez les économistes néoclassiques. Le point de départ de cette approche théorique, consiste à considérer que les différents types de capitaux sont substituables.
Si l'on considère que les capitaux sont substituables, cela signifie que l'on peut les remplacer les uns par les autres. Dans ce cadre, l'objectif poursuivi consiste à préserver l'ensemble formé par les différents types de capitaux :
Stock total des différents types de capitaux = Capital naturel + capital physique + capital humain + capital institutionnel.
C'est donc le niveau de ce stock total qu'il faut chercher à maintenir, voire à augmenter.
Quelle est la conséquence de cette hypothèse pour le développement durable ?
Si le capital naturel diminue (suite à l'épuisement de certaines ressources, par exemple), il faut que cette diminution soit compensée par l'augmentation de l'un des autres types de capitaux (capitaux physique, humain et institutionnel).
L'objectif poursuivi est, en effet, le maintien (voire l'augmentation) du niveau de bien-être des populations dans le temps. Or, pour maintenir ce bien-être, les individus doivent pouvoir obtenir la satisfaction de leurs besoins. Si le niveau global de capital diminue, ce maintien du bien-être devient impossible. D'où l'objectif de sauvegarde du niveau global de capital.
Cette vision est souvent considérée comme « optimiste » dans le sens où les mécanismes du marché, et surtout, l'innovation vont contribuer à garantir un développement durable.
Le progrès technique est, de fait, considéré comme une solution possible aux problèmes posés par le développement durable. Face aux pénuries de ressources naturelles, par exemple, les agents économiques sont incités à innover pour leurs trouver des substituts (ou du moins, réduire la consommation de ces ressources).
Le mécanisme est le suivant : lorsque la quantité disponible d'une ressource diminue, son prix augmente. Le coût que doit supporter un agent économique pour obtenir la quantité nécessaire à la satisfaction de ses besoins s'élève donc. Il devient alors rentable pour lui de financer des dépenses (celles liées à la R&D en particulier) visant à lui offrir des alternatives à cette ressource.
C'est le cas notamment du pétrole. Si les prix de celui-ci fluctuent en fonction d'éléments conjoncturels, il n'en reste pas moins que son prix s'élève de façon tendancielle. Cela a encouragé la R&D nécessaire à l'exploitation de gisements difficiles d'accès et par là trop coûteux à exploiter précédemment ainsi qu'à la recherche d'énergies de substitution.
Cette vision optimiste est renforcée par l'idée selon laquelle le développement en lui-même est une solution au problème du développement durable. Ici, intervient la courbe de Kuznets (à l'origine développée pour analyser l'évolution des inégalités), appliquée à la question du développement durable.
Simon Kuznets, Prix Nobel d’économie en 1971, analyse la relation entre croissance économique et inégalités économiques au travers de ce que l'on appellera la « courbe de Kuznets » :
Nous voyons donc […] que dans les pays développés la répartition du revenu dépend de facteurs très divers dont les uns favorisent une réduction de l’inégalité alors que les autres la renforcent. Il semble raisonnable de supposer qu’au début de la croissance, l’inégalité a augmenté dans la distribution du revenu total en raison de l’expansion rapide du secteur non agricole et de l’apparition de disparités de revenus plus accusées en son sein. Il est plus fondé encore de faire valoir que la réduction récente de l’inégalité des revenus provient de l’effet conjugué d’une réduction des disparités dans la production par travailleur, du déclin de la part que le revenu provenant de la propriété représente dans le revenu total des ménages et, enfin, des changements structurels qui ressortent des mesures arrêtées dans le domaine de la Sécurité Sociale et du plein-emploi.
Source : Simon Kuznets, La croissance économique moderne, 1971.
Pour commencer, il faut se souvenir que le mécanisme sur lequel repose la courbe de Kuznets est principalement lié aux modifications sectorielles des économies (notamment les mécanismes du déversement et de la destruction-créatrice).
Au départ, seul le secteur agricole est développé. Lorsque l'économie commence à croître, le secteur non agricole (Kuznets pense surtout au secteur industriel, mais on peut également faire référence aux services) se développe.
Conséquences :
⇒ Le nouveau secteur étant plus productif que le secteur agricole, il génère davantage de gains. Cela conduit à une augmentation des inégalités par augmentation des écarts de revenu entre le nouveau secteur et l’ancien secteur.
⇒ De plus, au sein du nouveau secteur, ce sont les agents économiques les plus productifs qui voient leurs revenus augmenter le plus. Cela se traduit par une augmentation des écarts de revenu au sein du nouveau secteur.
Au total, on voit les inégalités se creuser entre l'ancien et le nouveau secteur ainsi qu'au sein même du nouveau secteur.
Au bout d’un certain niveau de croissance, l'économie arrive à maturité.
Conséquences :
⇒ Innovations et amélioration du capital humain se sont étendues à l'ensemble de la production, entraînant une réduction des écarts de productivité entre les deux secteurs et au sein du nouveau secteur.
⇒ Par ailleurs, les moins productives ont désormais disparu (destruction-créatrice) et les agents économiques ont fini de se reconvertir (déversement et imitation), entraînant une baisse des gains des “pionniers” du nouveau secteur.
⇒ Enfin, l'intervention de l'État-providence permet le développement de la sécurité sociale, des politiques de redistribution et de lutte contre le chômage.
Au total, les mécanismes de marché ont réduit les inégalités entre les deux secteurs et au sein de chacun des secteurs. Les inégalités de salaire et de patrimoine ont donc tendance à diminuer. La création d’une protection sociale généralisée renforce cette diminution. Bref, les inégalités globales baissent.
Représentation graphique de la courbe de Kuznets :
Appliquée au développement durable, le raisonnement de Kuznets consiste à affirmer que les effets négatifs (pollution…) liés à l'activité humaine sont élevés lorsque le niveau de développement est faible mais qu'ils diminuent ensuite, lorsque le développement s'élève.
Encore une fois, ce raisonnement est, en partie, lié au progrès technique : au fur et à mesure du développement, les innovations permettent de réduire les effets négatifs auparavant incontournables.
De plus, les activités les plus polluantes sont davantage présentes dans les premières phases du développement. En effet, le secteur tertiaire (services) est, globalement, moins générateur d'effets négatifs que les secteurs primaire (agriculture) et secondaire (industrie). Or, dans les économies développées, ces derniers tendent à se réduire au profit du secteur tertiaire.
Enfin, les comportements des individus, et donc la demande qu'ils expriment, évoluent en fonction du niveau de développement. Ainsi, les préoccupations des individus, dans les pays développés, ne se réduisent plus à la satisfaction de leurs besoins élémentaires mais passent par des exigences plus importantes en terme de qualité de vie, une demande orientée davantage vers les services de conforts et de loisirs (activités moins polluantes)…
Pour les tenants de la soutenabilité forte, que l'on trouve notamment dans les courants hétérodoxes, la vision soutenue est nettement plus “pessimiste”.
Ils considèrent en effet que le capital naturel est spécifique, il ne saurait donc être remplacé par les capitaux produits par l'homme. Par conséquent, il est non substituable et il faut donc le préserver.
Le développement durable est alors garanti seulement si le stock de capital naturel ne décroît pas.
Dans ce cadre, le progrès technique n'est pas suffisant pour permettre le développement durable et ce d'autant qu'il peut conduire à une effet “rebond”5) : les gains de productivité réalisés grâce au progrès technique peuvent, paradoxalement, conduire à une augmentation de la consommation des ressources dans la mesure, notamment, où ces gains conduisent à la diminution de leur coût.
C'est donc par d'autres moyens qu'il faut garantir le développement durable. Cela passe, bien sûr, par la baisse de la consommation des ressources. C'est de là que se développe les théories de la décroissance ou de la croissance zéro. Ces dernières années, ce sont en effet multipliés les appels à une « croissance zéro » voire à « décroissance » de l'économie. Il ne s'agit plus seulement de revendiquer une croissance « soutenable », c'est-à-dire une croissance respectueuse de l'environnement et des ressources naturelles, mais un arrêt de la croissance de la production ou même sa diminution.
C'est dans cet ordre d'idée également qu'est formulé le principe de précaution :
Le principe de précaution est d'abord définit de la façon suivante, lors de la Conférence de Rio :
Source : Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement,, Principe 15, Rio de Janeiro, Brésil,3-14 juin 1992. Disponible en ligne : http://www.un.org/french/events/rio92/rio-fp.htm
Ce principe de précaution est formulé de la façon suivante lorsqu'il entre dans la Constitution française en 2005 :
Source : Charte de l'environnement (ajoutée à la Constitution de 1958 par la loi constitutionnelle n°2005-205 du 1er mars 2005), Article 5, 2004. Disponible en ligne : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/la-constitution/la-constitution-du-4-octobre-1958/charte-de-l-environnement-de-2004.5078.html
Tout d'abord, l'environnement dans son ensemble relève souvent des biens communs et/ou des biens collectifs (vu en 1ES).
Rappel :
(Programme 1ES 2010, Notions)
Un bien collectif est d'abord un bien qui peut être utilisé simultanément par plusieurs individus sans que la consommation de l’un ne réduise la consommation des autres (propriété de non-rivalité). À cette propriété de non-rivalité s’ajoute une propriété de non-exclusion. Dans ce dernier cas, aucun agent privé ne peut exclure de la consommation du bien les utilisateurs qui ne sont pas disposés à payer (on parle parfois de bien collectif pur dans ce cas).
Exemples : l’éclairage public, la défense nationale.
(Programme TES 2011, Notions)
Un bien commun se caractérise par une propriété de non-exclusion : aucun agent privé ne peut exclure de la consommation du bien les utilisateurs qui ne sont pas disposés à payer.
Par contre, un bien commun est un bien dont la consommation par un agent économique réduit la consommation des autres (propriété de rivalité).
Exemples : les transports en commun.
On comprend, au vu des caractéristiques de ces biens, la nécessité des politiques publiques. En effet, les mécanismes du marché ne peuvent permettre à eux seuls le traitement de ces biens spécifiques dans la mesure où la non-exclusion implique une difficulté à faire payer le prix de ces biens aux agents économiques (phénomènes de passager clandestin) et un risque de sur-consommation de ces biens.
C'est le cas, par exemple, pour le climat dans la mesure où il peut être considéré comme bien collectif. En effet, la dégradation du climat liée à l'activité humaine n'est pas prise en charge par le marché et, les agents économiques n'étant pas enclins à payer volontairement le coût de sa préservation, celle-ci passe par une intervention de l'État.
À cela il faut ajouter l'idée que les politiques publiques ne trouvent leur efficacité qu'à une échelle supra-nationale.
Si on prend l'exemple du climat toujours, il n'est guère possible d'envisager une politique climatique nationale, dans la mesure où la question climatique ne se réduit pas aux frontières d'un État. Or, la mise en place de politiques supra-nationales posent d'épineux problèmes de souveraineté et de conflits d'intérêt entre pays.
De plus, les effets négatifs sur l'environnement sont essentiellement issus d'externalités négatives, qui ne sont, elles non plus, pas prises en charge par le marché. Là encore, se justifie l'intervention de l'État pour pallier à cette défaillance du marché.
Enfin, les pouvoirs publics ont la possibilité de mettre en place des place des mesures coercitives, contrairement aux agents économiques, qu'il s'agisse des entreprises ou des individus. On peut se souvenir ici que Max Weber souligne que l'État se définit justement par le fait qu'il détient « le monopole de la violence symbolique légitime ».
Source : Elinor Ostrom, Governing the Commons: The Evolution of Institutions for Collective Action, Cambridge University Press, 1990, p. 90.
Favoriser le développement durable passe par une série d'objectifs que se donnent les pouvoirs publics.
Mettre en place un politique climatique signifie avant tout lutter contre le dérèglement climatique.
Cela passe, par exemple, par :
Quelques dates sont marquantes à cet égard :
Il existe trois principaux instruments pour mener des politiques climatiques : la règlementation (entendue au sens de normes), la taxation et les marchés de quota d'émission.
Voir Document 10. Dossier documentaire développement durable.
La réglementation passe par la mise en place, par les pouvoirs publics, de normes (lois, règlements, décrets…) qui s'imposent aux agents économiques. Il peut s'agir d'obligation ou, plus souvent en matière de climat, d'interdiction.
C'est un instrument qui, de part sa nature, est contraignant. Il implique, de la part de l'État, la mise en place de structures de contrôle et d'un système de sanction visant au respect de la règlementation en vigueur.
L'État peut, par exemple, interdire l'utilisation de certains produits (depuis le 1er janvier 2016, est ainsi interdite l'utilisation des sacs en plastiques non recyclables), fixer les limites d'émissions pour les substances responsables de la pollution…
La règlementation n'est pas sans inconvénient.
Elle implique notamment la capacité à définir clairement l'objet de la norme… ce qui n'est pas toujours évident.
Elle peut également s'avérer lourde et coûteuse à mettre en place du fait des contrôles et des sanctions qui l'accompagne… sans compter qu'elle peut susciter des comportements –légaux ou illégaux – visant à la contourner…
Voir Document 11. Dossier documentaire développement durable.
C'est Arthur Cecil Pigou (1877-1955) qui est à l'origine de l'idée d'une taxe (qu'on appelle d'ailleurs souvent taxe « Pigou » ou « pigouvienne ») visant spécifiquement à modifier le comportement des agents économiques les plus pollueurs : c'est le fameux principe « pollueur-payeur ». Il ne s'agit pas tant ici de contraindre l'agent économique que de l'inciter à modifier – de lui-même – son comportement pour ne pas avoir à payer la taxe. D'une certaine façon, il s'agit pour l'État de fixer un prix à la pollution.
En effet, aux coûts qu'il supporte habituellement, s'ajoutera le coût de la taxe qu'il devra payer s'il pollue.
On comprend d'ailleurs que la taxe sera d'autant plus efficace que son coût sera élevé pour le pollueur.
Par ailleurs, elle peut parfois impliquer l'affectation des recettes à une utilisation spécifique (financement de mesure de dépollution…).
Comment peut-il donc échapper à la taxe ?
À court terme, cela peut passer par la substitution des substances utilisées au profit d'autres moins polluantes (mais qui n'étaient pas rentables jusque là car plus chères), cela peut passer également par la baisse de la quantité produite (ce qui réduit là aussi la pollution)…
À plus long terme, cela peut passer par la modification du processus de production dans un sens plus favorable à l'environnement, par le recours à la R&D…
Là encore, la mise en place d'une taxe n'est pas sans inconvénient. Elle pose, elle aussi des problèmes de définition, notamment du niveau de la taxe et implique la mise en place de structure de collecte parfois plus couteuses que le fruit de la taxe.
Elle pose également la question de son acceptabilité et ce d'autant plus lorsqu'elle est mise en place à une échelle supra-nationale. Elle peut en effet susciter des comportements de fraudes et de fuites, au niveau des agents économiques, et poser des problèmes de souveraineté, au niveau des États.
Voir Document 12, 13 & 14. Dossier documentaire développement durable.
Le marché de quotas d’émission (ou « marché de permis d’émission ») consiste à créer un marché sur lequel s'échange des « droits à polluer » ou « permis » correspondant à des droits à émettre un certain niveau de pollution (les « quotas »).
Les pouvoirs publics vont ici fixer une quantité globale de pollution (qui correspond donc au maximum de pollution qui peut être émise) qu'ils répartissent entre les agents économiques (essentiellement les entreprises).
Cette répartition initiale peut se faire en fonction de la taille, des émissions de pollution antérieures.
Elle peut également faire l'objet d'enchères (auquel cas la répartition initiale à elle-même un coût pour les agents économiques).
Les agents économiques pourront, par la suite, s'échanger les permis, à un prix fixé par le marché. Les agents peu pollueurs peuvent, en effet, vendre les permis en excédent, tandis que les agents les plus pollueurs peuvent acheter des permis pour répondre à leurs besoins lorsqu'ils ne sont pas couverts par les permis déjà en leur possession.
Le problème des marché de quotas d’émission est que leur efficacité dépend de plusieurs éléments. Ils sont d'autant plus efficaces que : - le prix constaté sur le marché est élevé (or nous avons vu qu'il avait beaucoup diminué ces dernières années, et ce d'autant plus qu'il est sensible aux variations conjoncturelles), - le nombre de polluants concerné est élevé, - l'étendue des agents économiques concernés est grande (en terme de nombre d'entreprises, de secteurs/branches…).